Michel CLAEYS
Formateur. Président de l’association pour l’éducation émotionnelle.
Auteur de « Le défi émotionnel », « Education émotionnelle, de la maternelle au lycée », « Enseignants CPS » et plusieurs autres titres.
On voit bien de nos jours combien les compétences d’être sont primordiales pour mener une société chaotique vers plus de cohérence et d’harmonie. Le chacun-pour-soi ne peut mener qu’à plus de tensions, plus d’inégalités et plus de conflits. Pour avancer vers une civilisation capable d’apprendre de ses erreurs et de dégager de nouveaux modes de fonctionnement, il nous faut un peu plus d’intelligence émotionnelle et relationnelle. Et c’est dès le plus jeune âge que les apprentissages se font.
L’éducation émotionnelle et sociale n’est pas une méthode particulière mais une mouvance planétaire qui relève d’une prise de conscience généralisée sur l’importance, en matière d’éducation, d’inclure une dimension permettant de développer les compétences d’être et les compétences relationnelles des individus en général, et des enfants en particulier, afin de leur permettre d’être plus performants dans leur existence, de libérer leur potentiel et de s’intégrer harmonieusement dans la collectivité. Cette mouvance est désormais largement soutenue par la recherche, l’expérimentation et validée scientifiquement.
En ce qui concerne le contexte scolaire, l’éducation émotionnelle et sociale (EES) vise à instaurer un climat positif et coopératif en proposant des activités pédagogiques et ludiques qui lèvent les barrières entre les individus, qui relient, qui intègrent, qui installent la confiance, l’ouverture, l’acceptation mutuelle et qui permettent aux élèves de faire émerger les compétences et attitudes comportementales souhaitées tout en rehaussant leur motivation, leur capacité à coopérer dans leurs apprentissages et en finale leurs performances scolaires.
Mais il ne suffit pas de proposer quelques activités, aussi pertinentes soient-elles. C’est l’ensemble de la posture pédagogique qu’il convient de faire évoluer. Et en cela, tous les éducateurs sont concernés. Fondée sur les développements récents de la neuropédagogie, une éducation cohérente se doit de combiner désormais les approches active, positive, coopérative, ludique, diversifiée et démonstrative :
- Active: l’apprenant doit être acteur de ses apprentissages. Il doit être amené à faire des choix responsables, à se fixer ses propres objectifs et à s’autoévaluer. C’est une condition essentielle pour développer la motivation, mais aussi l’autonomie et la responsabilité.
- Positive: l’éducateur est là en soutien de ces apprentissages. L’action pédagogique est fondée sur la valorisation individuelle, incluant le droit à l’erreur et l’invitation positive à en dégager les apprentissages utiles.
- Coopérative: l’école est plus efficace lorsqu’elle est centrée sur le groupe et les relations entre pairs, utilisant la dynamique de groupe comme lieu privilégié où les apprentissages se font, dans et par l’interaction entre pairs. Cela, bien entendu, exige un cadre clairement posé, des règles de fonctionnement et des compétences bien intégrées.
- Ludique: réintroduisant le plaisir comme moteur essentiel du désir d’apprendre et de progresser.
- Différenciée et diversifiée: qui tient compte de la diversité des rythmes et des talents individuels autant que des multiples formes d’intelligence et voies d’entrée des apprentissages. Chacun n’évolue pas nécessairement vers les mêmes objectifs ni de la même façon. Mais chacun possède des talents particuliers qu’il est impératif de pouvoir mettre en valeur.
- Démonstrative: et enfin, l’éducateur doit pouvoir démontrer les compétences et les attitudes qu’il cherche à enseigner. Les apprentissages se font par l’observation et le mimétisme bien davantage que par l’information cognitive. Enseigner par l’exemple plutôt que par le discours ! Ceci est particulièrement vrai dans le domaine des compétences psycho-sociales.
L‘EES offre des réponses concrètes et pratiques aux défis de l’école et de l’éducation à notre époque. Elle rejoint les exigences de l’Education Nationale en matière de compétences psychosociales (CPS), telles qu’énumérées dans le « Livret Personnel de Compétences » et le « Code de l’éducation » relatives aux compétences sociales et civiques (pilier 6) et à l’autonomie et l’initiative (pilier 7), ainsi que dans le domaine 3 du nouveau Socle Commun de connaissances, de compétences et de culture. Elle entend fournir aux éducateurs et enseignants de tous niveaux les moyens pratiques qui leur permettront de rencontrer efficacement ces exigences.
Pourquoi moi, pourquoi maintenant ?
L’éducation émotionnelle et sociale est au cœur du changement de notre société planétaire. Demain, dans 10 ans, dans 20 ans, rien ne sera plus pareil. Les rapports entre les humains se transforment rapidement. Les entreprises commencent déjà à être gérées sur une base plus participative. La bienveillance et la coopération doivent se généraliser sur cette planète. Les modes de gouvernance doivent évoluer. Les rapports humains et les activités humaines doivent se transformer. Si la jeune génération veut pouvoir être à la hauteur des enjeux auxquels elle va devoir faire face, nous devons l’y préparer. Et si nous ne voulons pas être en décalage complet par rapport aux jeunes générations, nous devons nous y préparer également.
Face à l’urgence du réchauffement climatique, il n’y a que l’urgence du réchauffement relationnel entre les humains qui saute aux yeux comme étant d’une absolue nécessité. Chacun est concerné, et cela commence ici et maintenant, dans mon environnement personnel.
Michel Claeys
Pour aller plus loin, voir le site web www.education-emotionnelle.com
Le défi émotionnel (éditions Le Souffle d’Or, 2018)
Education émotionnelle, de la maternelle au lycée (éditions Le Souffle d’Or, 2014-2018)