Voilà une question que se posent de très nombreux parents à l’heure où arrivent les premières tensions avec les enfants qui entrent dans l’adolescence. Les neurosciences apportent beaucoup d’éléments de réponse sur le fonctionnement du cerveau. De nombreux spécialistes, à l’instar de Florence Meyer, présidente de l’association Quokka, nous donnent de précieux éclairages pour apaiser la relation parents/ados.
Le cerveau de l’ado fait le tri
À l’adolescence, le cerveau connaît de nombreux bouleversements hormonaux, émotionnels, physiques, identitaires. Les neurosciences indiquent un « remodelage » de cet organe. Des zones sont en construction comme le cortex préfrontal, zone capitale des décisions, du raisonnement et des émotions. C’est là que se déchiffrent les expressions et la compréhension des ressentis.
Si on compare le cerveau à une forêt et les connexions neuronales à des chemins forestiers, l’adolescent ne va pas « se prendre la tête ». Il va emprunter ceux qui l’inspirent et lui apportent de la reconnaissance, de la joie.
Idem pour résoudre une situation, gérer des informations ou des apprentissages. Une routine se met en place et la répétition lui permet de développer rapidité et performance. C’est ainsi que l’enfant qui pratiquait le piano, le théâtre ou qui adorait se balader en forêt abandonne certaines activités pour se concentrer sur d’autres comme les réseaux sociaux ou les championnats de France de natation.
Le parent vit cet élagage cérébral comme une perte de potentiel et non comme un gain en compétences, c’est compréhensible. L’étincelle de récompense ou la valorisation permet d’augmenter la confiance en soi et de compenser l’effort. En se rapprochant de ses pairs, le partage amical est un parcours de reconnaissance plus épanouissant que les notes de maths ou le sourire de papa maman.
Comment réagir quand on est parent ?
Il n’y a pas de méthode clé en main. Chaque parent, chaque ado, chaque relation est unique par son fonctionnement et ses interactions. La crise d’ado est plus douce si le parent endosse le costume d’adulte car il y aura moins d’affect et d’attentes. Au 19e siècle, l’adolescent se confrontait au monde à l’extérieur de la famille.
Par ailleurs, le jugement fige les situations, baisse la confiance et l’estime de soi chez le parent comme chez l’ado. Vous n’êtes plus son idole, sa référence ? Tant mieux ! Il se tourne vers le monde et trouve ses valeurs : solidarité, justice, loyauté. Il construit ses combats.
En revanche, tous les ados veulent que leurs parents soient fiers d’eux, leur fassent confiance. Cela inclut les erreurs, les tâtonnements, les tests, les prises de risques. La crise d’ado peut devenir une vraie renaissance pour tous ! Le parent parfait n’existe pas, soyez vous-même.
Un conseil pour améliorer la relation ?
Parler de votre expérience de parent comme modèle a une valeur de construction pour vous dans le monde qui était le vôtre. Laissez lui construire ses propres repères dans le monde d’aujourd’hui ! Préférez le mode stratégie (« comment penses-tu t’y prendre ? ») au mode anticipation qui peut se révéler angoissant, enfermant pour votre ado, comme s’il ne pouvait que reproduire l’imagination parentale.
Face à une situation donnée, démêlez le concret des émotions. Vous voulez qu’il passe moins de temps sur les réseaux sociaux ? Pour construire votre adulte en herbe : affichez vos raisons, votre cadre. S’il s’oppose, acceptez la discussion, argument contre argument.
Quant à vos émotions, votre peur, les ados ne savent pas les gérer. Pour eux c’est un manque de confiance. Demandez des choses concrètes, des horaires par exemple. Répéter l’injonction, façon piqûres de moustique, rendra inévitablement votre ado insensible à vos paroles. Dire par écrit a parfois plus de succès.
Un conseil pour désamorcer un conflit ?
Voilà 7 actions à retenir en cas de conflit naissant :
- Écouter,
- accueillir,
- comprendre,
- reformuler,
- faire confiance,
- accepter l’erreur
- discuter.
Imaginons : un parent a des difficultés de communication avec son ado de 14 ans (insultes, violences, etc). Ils font les devoirs ensemble, en raison des difficultés scolaires et d’attention du fils. Le jeune veut devenir pilote de ligne, c’est son obsession. Pilote de ligne ou pilote de sa vie ?
Soyez stratégique : côté scolaire, il faut vérifier le pourquoi des difficultés. Intéressez-vous aussi au choix professionnel : « c’est un beau métier en effet, comment te vois-tu ? Et l’uniforme ? Aviation civile, militaire, commerciale ? »
Visualiser permet de comprendre les besoins de l’ado. Du rêve à la réalité : a-t-il regardé comment réaliser son rêve, le rendre réel ? Que faudrait-il changer pour qu’il existe ? La réalité scolaire est-elle un obstacle surmontable ? N’attendez pas de réponses immédiates à vos questions, il faut le temps de la réflexion même quand il s’agit du quotidien.
« On mange dans 5 minutes » marche mieux que : « viens manger ! » Vous l’aimez, il le sait. Dîner avec vous est moins séduisant que quelques minutes de plus au téléphone avec des amis ! L’adolescence se construit pas à pas, avec patience, espoir, il n’y a pas de baguette magique pour passer de l’enfance à l’âge adulte !
Pour en savoir plus, découvrez le travail remarquable de Florence Meyer : coach scolaire spécialisée dans l’adolescence et la parentalité adolescente, elle a créé l’association Quokka qui aide les parents à accompagner les ados dans leur recherche d’autonomie et d’avenir.
Retrouvez plus de conseils et d’inspirations sur les neurosciences dans le 2ème numéro du magazine Innovation en Éducation.
Pour aller plus loin, vous pouvez aussi découvrir les richesses de la neuroéducation, un sujet abordé dans le 39ème épisode du podcast Innovation en éducation.